vendredi 9 mai 2008

Le président Guebuza à la biennale de l’éducation en Afrique: Continuer à investir dans la formation du capital humain

Maputo, 6 mai 2008 – Le chef de l’Etat mozambicain, Armando Emilio Guebuza, a ouvert lundi 5 mai, au Centre international des conférences Joaquim Chissano, la biennale de l’éducation en Afrique par un fort plaidoyer en faveur de la poursuite et du renforcement de l’investissement dans le capital humain pour le développement des pays africains. A cet égard, il a tenu à féliciter l’Association pour le développement de l’éducation en Afrique (ADEA), « ce réseau qui intègre les gouvernements, la société civile et les partenaires internationaux », l’encourageant « à poursuivre pendant plusieurs années encore sa difficile mais noble mission ».

S’adressant aux 600 participants présents au rendez-vous le plus important sur le continent dans le domaine de la coopération éducative, le président Guebuza a déclaré que, concernant l’éducation post-primaire, thème de la biennale, l’enseignement technique et professionnel bénéficie d’une attention spéciale de la part du gouvernement de son pays. Ainsi, a-t-il indiqué, un programme intégré de réforme de l’enseignement professionnel a été lancé en vue de donner un nouvel élan à la formation de ressources humaines pour le pays. Il s’agit, a-t-il expliqué, d’un programme fondé sur le principe d’une plus grande flexibilité et polyvalence et d’une formation pour la vie basée sur l’acquisition de compétences, dont l’objectif est de former des citoyens aptes à participer de manière plus active à la production de richesses et à leur gestion judicieuse.

Pour le chef de l’Etat mozambicain, « il faut absolument continuer à investir dans la formation du capital humain, à introduire des améliorations significatives au plan de la qualité et du niveau des capacités de nos compatriotes et à encourager et appuyer l’effort en direction des filles ». A propos de celles-ci, il a souligné qu’il fallait non seulement favoriser leur scolarisation et leur maintien dans le système scolaire jusqu’au terme de leur formation, mais aussi leur proposer l’enseignement supérieur et l’enseignement technique et professionnel comme autant d’objectifs à atteindre.
Le président Guebuza a, par ailleurs, insisté sur l’importance de la recherche scientifique et technologique et des échanges entre les scientifiques africains, et entre eux et leurs collègues d’autres continents, processus dans lequel l’ADEA, a-t-il estimé, peut continuer à jouer un rôle de haut niveau.
Au nom du président en exercice de l’Union africaine (UA), Jakaya Mrisho Kikwete, le Premier ministre tanzanien, Mizengo Peter Pinda, a suggéré l’élaboration par l’organisation panafricaine d’un rapport annuel sur l’éducation présentant les progrès et les contraintes de chaque pays et permettant de s’inspirer des expériences proches, au lieu de toujours tourner les regards vers les modèles des autres continents. Dans ce domaine, a-t-il souligné, « l’ADEA a beaucoup à offrir et nous devons avoir nos propres plans pour atteindre nos objectifs ». Il a insisté sur l’ancrage de l’Association dans l’Afrique et le renforcement du partenariat avec l’UA.

Dans son message lu par Boubekeur Benbouzid, ministre algérien de l’Education, le président de la République d’Algérie, Abdelaziz Bouteflika, hôte d’honneur de la biennale, a relevé les efforts déployés par les pays du continent, dont le taux d’alphabétisation est passé de 10% dans les années 1960 à 70% aujourd’hui, et les inscriptions scolaires de 57% en 1999 à 70% en 2005. Il reste cependant, a poursuivi le chef de l’Etat algérien, « que 30% de jeunes Africains ne sont pas scolarisés, alors que le nombre d’enfants en âge scolaire augmente sensiblement. Le nombre de jeunes Africains de moins de 14 ans est passé de 273 millions en 1990 à 348 millions en 2007 ; il sera de 403 millions en 2015. »

Après avoir rappelé les engagements pris lors de la 2e Conférence des ministres africains de l’Education tenue en avril 2005 en Algérie ainsi que la création par le secrétaire général des Nations unies d’un groupe de pilotage chargé de coordonner les efforts en vue de la réalisation des Objectifs de développement du millénaire, le président Bouteflika a attiré l’attention sur les facteurs annihilant tout effort de développement dans le secteur de l’éducation que sont « les conflits politiques et militaires, les menaces à la paix et à la stabilité, la mauvaise gestion et le gaspillage ».

Le Directeur général de l’UNESCO, Koïchiro Matsuura, a insisté sur le tableau contrasté que présente l’Afrique en termes de progrès vers l’éducation. Ainsi, a-t-il indiqué, l’Afrique subsaharienne a été le continent dans lequel le taux d’inscription au niveau primaire a augmenté le plus rapidement. Entre 1999 et 2005, le nombre d’enfants à l’école a augmenté de 36 %, soit environ 29 millions. Un autre développement significatif, a-t-il poursuivi, a été « l’élargissement de l’éducation primaire afin d’y inclure les premières années du niveau secondaire de la scolarité, offrant ainsi aux enfants et à la jeunesse de meilleures chances de terminer la partie obligatoire de la scolarité en disposant des compétences nécessaires pour participer pleinement à leurs sociétés ».

Malgré ces tendances très positives, a fait remarquer M. Matsuura, les niveaux d’abandon sont plus élevés en Afrique que nulle part ailleurs dans le monde. L’Afrique subsaharienne compte encore 45% des 72 millions d’enfants non scolarisés, c'est-à-dire à peu près 33 millions au total. Parmi ceux-ci 54% environ sont des filles. Par ailleurs la qualité reste une source de préoccupation majeure, notamment en raison du manque d’enseignants qualifiés. A l’horizon 2015, il faudra 3,8 millions d’enseignants supplémentaires.

Après avoir relevé que 150 millions d’adultes en Afrique subsaharienne, dont deux tiers sont des femmes, ne possèdent pas les compétences de base d’alphabétisation, le Directeur général de l’UNESCO a évoqué l’ombre menaçante que constituent la crise alimentaire croissante, les ravages du HIV/Sida et la tendance à réduire les fonds alloués à l’éducation. Il a notamment exhorté les bailleurs de fonds à tenir les promesses du Forum de Dakar en avril 2000, soulignant que l’UNESCO s’engagera dans ce plaidoyer à l’occasion du Sommet du G8 à Hokkaido, en juillet prochain, et de la 4e conférence internationale de Tokyo sur le développement de l’Afrique, un mois plus tard.

Dans son mot de bienvenue, Bonifacio Aires Ali, ministre mozambicain de l’Education et de la Culture, a déclaré : « Penser à l’éducation post-primaire est une question d’urgence et de garantie pour notre survie comme Etats souverains ; réfléchir à l’éducation post-primaire aujourd’hui, c’est penser au développement des ressources humaines qui garantissent la victoire dans la lutte contre la pauvreté demain ; réfléchir à l’éducation post-primaire, c’est penser que nos jeunes, enfants, hommes et femmes doivent avoir des connaissances scientifiques, doivent maîtriser la technologie ; c’est garantir le développement durable de l’Afrique. »

Le président de l’ADEA, Dzingai Mutumbuka, s’est réjoui, pour sa part, d’une si grande affluence, avec une soixantaine de ministres, de la tenue de la biennale pour la première fois dans un pays lusophone d’Afrique et de la première participation des pays d’Afrique du nord. Il a estimé que le thème de la biennale était totalement approprié dans la mesure où il s’agit de la formation des compétences dont l’Afrique a besoin, de la reconstruction des systèmes éducatifs, ce qui représente un défi majeur.

La présidente du bureau des ministres africains de l’ADEA, Rosalie Kama-Niamayoua, ministre de l’Enseignement primaire et secondaire du Congo, a relevé que « la communauté éducative africaine, dans toutes ses composantes, décideurs politiques, professionnels et chercheurs en éducation, organisations de la société civile, partenaires techniques et financiers, se retrouve à Maputo pour identifier des pistes d’accélération des progrès de l’éducation dans notre continent, au moment où l’on parle de l’économie des savoirs ».

Elle a affirmé qu’une refondation de nos systèmes éducatifs s’impose à nous si nous voulons combler les fossés qui les séparent des systèmes éducatifs plus performants des autres continents. Il ne s’agit nullement, a-t-elle fait observer, d’une forme d’afro-pessimisme, mais d’une invite à un engagement volontariste pour relever les défis que pose l’éducation en Afrique. Mme Kama-Niamayoua a insisté : « Il nous faut oser rompre avec la reproduction des modèles, oser inventer les modèles adaptés à nos contextes et réussir des modèles éducatifs africains. »

Créé pour promouvoir et améliorer l’éducation des filles, le Forum des éducatrices africaines (FAWE) a identifié « de nouvelles avenues pour mieux appréhender les obstacles » à ses objectifs. Sa présidente, Simone de Comarmond, a annoncé une intervention pour orienter un plus grand nombre de filles vers la carrière enseignante. Par ailleurs, elle a indiqué que le FAWE a initié dans trois pays –Burundi, Libéria et Sierra Leone - un programme d’habilitation et d’autonomisation économique à travers la formation technique et professionnelle afin « d’intégrer les filles non scolarisées ou en déperdition scolaire pour cause de conflits ».

La vice-présidente de la Banque africaine de développement, Zeinab El Bakri, a axé son intervention sur le développement des compétences. Après avoir mis l’accent sur l’augmentation sans précédent du taux de croissance d’un bon nombre de pays du continent, elle a expliqué que de tels résultats tiennent aussi à des facteurs comme la paix et la stabilité, l’amélioration de la gouvernance et les réformes économiques. Toutefois, a-t-elle prévenu, la croissance enregistrée risque d’être freinée par le manque de ressources humaines compétentes dans de nombreux secteurs d’activité et à différents niveaux d’éducation. Ce sont là les défis auxquels il faut trouver des réponses appropriées en rapport avec les secteurs de production.

Mme El Bakri a choisi l’exemple actuel de la crise alimentaire pour plaider en faveur de l’enseignement agricole à travers la formation aussi bien professionnelle qu’universitaire. Elle a évoqué à cet égard l’adoption d’approches innovantes pour combiner recherche agronomique et entreprenariat, accélérer l’introduction des technologies agricoles modernes dans les systèmes locaux d’exploitation et auprès des paysans et autres exploitants agricoles. Une même réflexion est à entreprendre pour accélérer le développement des compétences dans d’autres secteurs parce que l’existence d’un capital humain bien formé constitue un préalable à une croissance et un développement socio-économique durables.

Le représentant de la Banque mondiale, Yaw Ansu, a reconnu que tous les pays africains subissaient une pression pour étendre les opportunités d’apprentissage dans l’éducation post-primaire. Répondre à cette demande, c’est permettre aux pays d’être en position de s’approprier et d’adapter les nouvelles technologies plus facilement en vue d’améliorer la compétitivité de leur économie dans le contexte de la globalisation. Cela constitue une nécessité compte tenu de l’évolution des enjeux économiques et de l’émergence de nouveaux grands acteurs sur le marché comme la Chine et l’Inde.

M. Ansu a mis en exergue le travail que réalise l’ADEA en créant un puissant marché d’idées et d’expériences, remplissant ainsi sa fonction de réseau des réseaux. C’est pourquoi, a-t-il affirmé, la Banque mondiale apporte son soutien constant à cette organisation unique dans son genre.

Le thème central « Au-delà de l’éducation primaire : défis et approches pour étendre les opportunités d’apprentissage en Afrique » sera abordé sous trois grands volets : l’extension de l’éducation obligatoire pour tous à 9-10 ans ; le défi du développement des compétences pour mieux préparer les jeunes à l’insertion socioprofessionnelle ; l’articulation entre le deuxième cycle du secondaire et l’enseignement supérieur en vue de la formation de ressources humaines pour le

développement de l’Afrique.

Première biennale accueillie par un pays lusophone, le rendez-vous de Maputo sera marqué par la célébration du 20e anniversaire de l’ADEA. Il consacrera l’ancrage de l’Association dans le continent qui se matérialisera par le prochain transfert de son Secrétariat à Tunis au sein de la Banque africaine de développement et par le renforcement du partenariat avec l’Union africaine.

Source: GT COMED

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