mardi 8 septembre 2009

Inde : le droit à la scolarisation, mais pas à l’éducation

Swaminathan S. Anklesaria Aiyar, le 2 septembre 2009 - L’Inde vient de promulguer une loi sur le Droit à l’Education garantissant à chaque enfant âgé entre 6 et 14 ans le droit à un enseignement gratuit et obligatoire. La nouvelle loi est d’essence socialiste : elle vise à assurer que, dans la mesure du possible, les gouvernements des états offrent une scolarisation publique à tous les enfants. Mais elle oblige aussi les écoles privées à réserver un quart de leurs places pour les enfants de familles pauvres et des castes inférieures. Cela pourrait, presque par inadvertance, déboucher sur le plus grand programme de « choix de l’école » (le school choice) au monde, couvrant 30 millions d’enfants.

La nouvelle loi présente plusieurs défauts. D’abord, les enseignants publics ne peuvent pas être licenciés, une des raisons qui explique l’absentéisme chroniquement élevé des enseignants dans les écoles publiques. Dans un sondage réalisé par un économiste de Harvard, un quart des enseignants publics ont été absents un jour donné, et seulement la moitié ont assuré leur service normalement. La loi ne traite par ailleurs pas de la responsabilité des enseignants devant les parents. En fait, les syndicats d’enseignants sont trop puissants pour que les hommes politiques osent leur imposer une quelconque discipline.

Actuellement, des millions d’enfants finissent leur scolarisation sans être capable de lire de courts paragraphes ou de faire des additions toutes simples. Pourtant, la loi ne parle que de l’accès aux écoles. Elle se préoccupe seulement des « entrées » et non des résultats. Elle offre un droit à la scolarisation, mais pas à l’éducation.

Les enfants des familles les plus riches obtiennent de meilleurs résultats parce qu’ils bénéficient des cours privés du soir, dispensés parfois par le même enseignant qui était absent à l’école publique le matin. La nouvelle loi interdit au personnel enseignant du public de donner des cours particuliers. Ceci est censé les inciter à prendre l’enseignement à l’école publique plus au sérieux. Hélas, les enseignants enfreindront certainement cette règle en toute impunité.

La loi stipule des normes de qualité et de certification officielle pour toutes les écoles privées, mais aucune pour les écoles publiques. Les enseignants du public seraient-ils armés avec les diplômes appropriés, alors que de nombreux enseignants d’écoles privées ne le sont pas ?

Pourtant, en l’absence de motivation ou de responsabilité devant les parents, l’enseignement dans les écoles publiques est si pitoyable que de nombreux parents pauvres dans les bidonvilles urbains envoient leurs enfants à des écoles privées payantes plutôt qu’aux écoles publiques gratuites. Si ces écoles privées sont souvent de qualité médiocre, les pauvres trouvent la qualité des écoles publiques encore pire.

La nouvelle loi stipule en outre que toutes les écoles privées doivent réserver un quart de leurs sièges à partir de la première année aux enfants du voisinage des « classes défavorisées en matière sociale et éducative », des castes hindoues inférieures et des pauvres, qui constituent bien plus de la moitié de la population. Pour ces enfants, l’État remboursera les écoles privées. Ce ne sera pas le système de chèques-éducation standard comme dans d’autres pays. En effet, de nombreux politiciens détestent l’expression-même même de « chèque-éducation », et voient le quota de 25% comme une façon de forcer la main des écoles d’élite plutôt que d’émanciper les élèves grâce au choix de l’école.

Les écoles privées d’élite craignent que le système leur impose une taxe énorme et injustifiée car le chèque-éducation ne couvrira pas leurs coûts réels. Ils vont probablement solliciter les tribunaux contre les dispositions de remboursement de la nouvelle loi. Reste à voir quelle position les tribunaux adopteront.

Swaminathan S. Anklesaria Aiyar est analyste au Center for Global liberty and Prosperity du Cato Institute.

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