mardi 23 mars 2010

A propos de la grève dans l’enseignement : Le danger de l’implication des élèves

Les élèves étaient dans les rues hier lundi 22 mars 2010 à Cotonou et le seront également aujourd’hui à Porto-Novo en réaction contre la grève de leurs enseignants qui ont abandonné la craie. Scénario qui amène à prévoir des lendemains agités dans le pays.

Les débrayages de ces dernières semaines n’ont rien à voir avec les grèves des enseignants d’entre 2004 et 2005. Pendant plus de quatre mois, l’école est restée fermer et on était à quelques doigts de l’année blanche sous le régime Mathieu Kérékou enfin de mandat à l’époque. Et, c’est grâce au clergé qu’une porte de sortie a pu être trouvée avec des sacrifices qui dépassent l’entendement. C’est évidemment à cet effet que la fameuse revendication des 25% de primes sur les salaires a été accordée aux enseignants avec une allocation de 4000 f cfa pour le logement. Mais, le gouvernement du Général Mathieu Kérékou à bout de souffle n’a concédé que 7000 f cfa au lieu des 25% retenu parce que les parties s’étaient entendues pour que les acquis soient payés à une autre date. Le président Yayi Boni héritier de cette doléance fera ainsi face aux représailles à la fin du moratoire de deux ans qui lui a été accordé. C’est ainsi qu’en 2008, il a été contraint de doubler l’allocation de logement, suspendre le paiement des 7000 f cfa pour rendre applicable la prime de 25% sur les salaires que les syndicalistes exigent de toucher jusqu’à leur tombe. C’est la situation actuelle.

Les élèves aussi

L’entrée des élèves dans la danse aux côtés d’un des protagonistes de la crise gêne, pour marquer la différence entre des mouvements actuels et ceux de 2004-2005. Lesquelles différences nous renvoient en 1989 où l’un des protagonistes à la crise y avait intérêt. Parce que la crise est devenue politique et tous les moyens qui s’offrent, constituent un plus pour atteindre les objectifs fixés. Mais comme aujourd’hui, le troisième larron que constitue les élèves, n’est pas entièrement au parfum de ces objectifs encore moins des causes réelles des actes à poser. C’est ce qui justifie la réaction de bon nombre d’élèves face aux caméras. A part les meneurs qui appelaient leurs enseignants pour la reprise des activités pédagogiques, ils sont un certain nombre qui jouait aux accompagnateurs innocents. Or, s’ils savaient qu’un camp profitait d’eux pour ses intérêts, ils se seraient abstenus. Parce que les conséquences de leurs comportements sont telles qu’ils risquent avec leurs parents d’être les plus grands perdants. Comme ce fut le cas hier où un des manifestants innocents aurait reçu une bombe lacrymogène dans un œil. Sans compter les autres blessés qu’on ne signale pas et c’est à la maison que le pot aux roses se découvre malheureusement. Simplement parce qu’entre temps, un autre acteur s’est impliqué dans la danse. Ce sont les éléments des forces de l’ordre obligés de jouer leur partition dans de pareilles circonstances. C’est ce qui s’est passé hier à Cotonou et risque de se passer aujourd’hui à Porto-Novo pour compliquer les données et crucifier le premier magistrat qui a déjà du mal à gérer plusieurs autres affaires. Ce qui est plus grave, c’est qu’on ne peut à priori prévoir les dégâts. Pourtant, il était nécessaire que force reste à la loi. Parce qu’on ne saurait laisser des manifestants à eux-mêmes sans parer au plus pressé. Et en cas de casse, il faut forcément une force tampon pour sauver les meubles. Dans le cas actuel, c’est la façon dont ça dégénère souvent et la réplique qui s’en suit qui n’arrange pas le président Yayi Boni. Et plus il y a de blessés, plus les manifestations se radicalisent et donnent droit à des interprétations internes comme externes. Et de fil en aiguille, le chef est vomi. Il semble que c’est vers cette alternative que l’Alliance ‘’Union fait la nation’’ tend à conduire le gouvernement du changement qui multiplie des erreurs en ce moment où il faut plutôt assez de calme et de doigter pour répliquer.

Jean-Christophe Houngbo (Br. Ouémé/Plateau)Quotidien Le Matinal

lundi 22 mars 2010

Les enseignants ne demordent pas face au gouvernement de Boni Yayi

le 21 Mars 2010

Le dimanche 21 Mars 2010, les délégués syndicaux des bureaux nationaux des syndicats de base du Front d’Actions des Syndicats des trois ordres d’Enseignement ont eu une réunion extraordinaire au siège du Synemp pour examiner le contenu du communiqué provocateur conjoint que diffusent les ministres des enseignements maternel, primaire et secondaire depuis le samedi 20 Mars 2010.

L’analyse approfondie du contenu dudit communiqué a permis aux délégués syndicaux présents de faire les constats ci-après : 1- Contrairement à l’appel aux discours et aux actes d’apaisement lancé par le Président du Conseil National de l’Education à sa sortie d’audience avec le Chef de l’Etat le vendredi 19 mars 2010, appel lancé à tous les acteurs du système éducatif béninois face aux litiges collectifs qui opposent le Front au Gouvernement, ce dernier continue de proférer des menaces aux grévistes ; 2- Les menaces de remplacement des enseignants grévistes sont des actes de discrimination antisyndicale condamnés par les dispositions de l’article 46 du Statut Général des agents permanents de l’Etat qui stipulent que « l’Etat ou la collectivité publique intéressée est tenue de protéger l’Agent Permanent de l’Etat contre les menaces, attaques, quelle qu’en soit la nature, dont il peut être l’objet à l’occasion de l’exercice de ses fonctions » ; 3- Les principes du Comité de la liberté syndicale du Bit condamnent tout acte de discrimination en matière d’emploi à l’encontre de dirigeants syndicaux, de syndicalistes ou de travailleurs pour avoir organisé des grèves licites ou y avoir participé ;

4- Le recours à des mesures extrêmement graves comme le licenciement de travailleurs du fait de leur participation a une grève... implique de graves risques d’abus et constitue une violation de la liberté syndicale ;

5- Le déni du droit de négociations dont la délégation du Front a été victime le Mercredi 10 Mars 2010 au palais de la République, négociations relatives aux engagements non honorés du Chef de l’Etat depuis 2008 et examinés avec propositions contenues dans le rapport général de la Commission Paritaire Ad’hoc, viole les dispositions de l’article 3 de la loi portant exercice du droit de grève en République du Bénin. A la lumière de ce qui précède, les dirigeants syndicaux du Front invitent les enseignants grévistes à rester sereins et à faire échec aux menaces de remplacement comme c’était le cas avec les « douaniers patriotes ».

Les enseignants diplômés sans emploi n’ont pas besoin d’un remplacement ignorant de la législation. La reprise des cours dépendra de la manifestation de la bonne foi du Gouvernement. La menace de remplacement est l’une des armes dont font usage les Gouvernements impopulaires en perte de vitesse qui se préparent à instaurer un régime de dictature. Le Front reste convaincu que ce dont le peuple a besoin aujourd’hui, c’est d’un climat d’apaisement propice à l’ouverture rapide de négociations sereines et franches pour une sortie de crise qui sécurise la carrière et la retraite de tous les enseignants et honore l’école et la nation béninoise toute entière.

Pour le Front

Les Porte-Parole :

Raouf Affagnon

Thomas Hounguè