lundi 12 mai 2008

Table Ronde du RJCE-BENIN

THEME : ‘’Les programmes d’études au Bénin : Quelles orientations après le forum national sur l’éducation ?’’

RAPPORT GENERAL

Centre WANAD, Cotonou, le 23 février 2007

Introduction

Dans le cadre de ses activités dénommées ‘’les Mensuelles de l’éducation’’, le Réseau béninois des Journalistes et Communicateurs spécialisés en Education (RJCE-BENIN), avec l’appui financier du Groupe de travail COMED, a organisé, le 23 février 2007 au Centre WANAD à Cotonou, une table ronde sur le thème : ‘’Les programmes d’études au Bénin : Quelles orientations après le forum national sur l’éducation ?’’

Les Mensuelles de l’éducation sont un cadre de débats et d’échanges autour des questions liées au secteur de l’éducation. Fort de l’importance de ces questions dans le développement du pays, le RJCE-Bénin entend instaurer cette tribune, qui rassemblera les professionnels des médias intéressés par les problèmes relatifs à l’éducation, une fois le mois, pour s’imprégner des réalités du secteur et disposer des pistes pour d’éventuelles investigations sur le terrain.

Ainsi, les Mensuelles de l’éducation offrent aux membres du réseau l’opportunité de s’informer et de se spécialiser davantage pour une réelle prise en compte des questions de l’éducation dans les médias. Ces mensuelles de l’éducation créent donc un cadre d’échanges entre les professionnels de l’information et de la communication, les décideurs et les différents partenaires impliqués dans le développement de l’éducation.

I Déroulement de la table ronde

La table ronde sur ‘’les programmes d’études au Bénin : Quelles orientations après le forum national sur l’éducation ?’’ a regroupé une quarantaine de participants, composés de professionnels des médias, membres du RJCE-Bénin, d’acteurs, de décideurs et de partenaires du système éducatif béninois (Voir la liste des participants en annexe). Ce cadre d’échanges a offert l’opportunité aux participants d’être mieux informés sur les programmes scolaires depuis l’indépendance du Bénin en 1960, l’expérience en matière des programmes scolaires, l’élaboration et la mise en œuvre des programmes d’études actuels au Bénin, les défis à relever et les perspectives d’avenir après le Forum national sur le système éducatif béninois, tenu à Cotonou, du 12 au 16 février 2007 (Voir le programme de la table ronde en annexe).

A Ouverture des travaux

A l’ouverture de cette table ronde, le Président du RJCE-Bénin, M. Gérard GUEDEGBE a rappelé aux participants que cette rencontre, née du partenariat avec le COMED, s’inscrit dans le cadre des activités périodiques du réseau, destinées à une information régulière des membres sur les enjeux majeurs de l’éducation. Cette table ronde vise aussi le renforcement des compétences professionnelles des membres pour une amélioration de leurs productions sur l’éducation.

Les objectifs principaux de ces mensuelles de l’éducation a-t-il ajouté, sont ‘’de nous permettre d’avoir des informations essentielles sur des questions spécifiques et de nous former pour la promotion de l’éducation.’’

Après avoir indiqué que le RJCE-Bénin ambitionne d’être un groupe spécialisé dans l’information et la communication sur l’éducation, M. Gérard GUEDEGBE a appelé les membres du réseau à l’engagement et à l’esprit de sacrifice pour faire de l’éducation leur priorité en tant que journaliste et communicateur. Il a enfin convié les participants à participer régulièrement aux activités du réseau et à profiter de cette table ronde pour obtenir suffisamment d’informations des techniciens, qui ont accepté de participer à la rencontre.

B Attentes des participants

A la suite de cette allocution introductive, les participants se sont présentés individuellement, en exprimant également leurs attentes par rapport à la table ronde.

Les attentes exprimées se présentent comme suit :

- que l’on donne des moyens aux journalistes de se spécialiser dans le domaine de l’éducation ;

- que l’on nous dise ce qui va changer concrètement dans l’éducation après le Forum ;

- que les débats puissent me permettre de rehausser mon niveau pour mieux aborder les

questions d’éducation

- que vous puissiez nous faire un résumé des résolutions du forum sur l’éducation

- nous proposer des thématiques que nous pouvons aborder dans la presse pour contribuer à

l’exécution des recommandations du Forum sur le terrain ;

- que la table ronde nous permette d’aborder désormais les questions d’éducation avec un peu

plus de clairvoyance et avec un peu plus de responsabilité ;

- que les spécialistes de l’éducation puissent nous proposer les sujets et les angles, tout ce qui

peut nous permettre (aux journalistes et aux communicateurs) d’aider les acteurs du monde

de l’éducation à évoluer ;

- que cette table ronde nous permette de constituer un lobby pour veiller à ce que les

recommandations du Forum ne soient pas rangées dans les tiroirs et que nous puissions faire

pression sur les gouvernants pour que quelque chose change réellement dans l’éducation ;

- que tout ce que nous aurons arrêté au cours de cette table ronde soit relayé auprès des

Ministères de l’Education ;

- comment les acteurs de l’école pourront désormais orienter ces nouveaux programmes pour

que cela soit à l’avantage des élèves et des parents?

- nous permettre d’asseoir les bases pour la promotion de l’éducation dans notre pays ;

- que nous soyons davantage outillés afin de mieux appréhender désormais les questions et les

problèmes liés à l’éducation ;

- avoir plus d’information sur le contenu des travaux du Forum national ;

- avoir des outils pour combattre le sida dans le monde de l’éducation ;

- j’attends beaucoup de cette table ronde ;

- plus d’informations sur les résolutions et les orientations du Forum national ;

- que les enseignants nous disent ce qu’ils attendent désormais des orientations du ce forum ;

- avoir une connaissance précise du contenu des programmes d’études pour permettre au

réseau d’être plus efficace sur le terrain ;

Les activités proprement dites de la table ronde ont été faites d’exposé et d’interventions, suivis de débats et d’échanges.

C Exposé et interventions

L’exposé principal sur les programmes d’études et les nouvelles orientations du Forum national sur l’éducation a été présenté par M. Magloire COSSOU, Inspecteur de l’Enseignement du Premier Degré.

M. Magloire COSSOU a axé sa communication sur les quatre points suivants :

- Les généralités sur les programmes scolaires

- L’expérience béninoise en matière de programmes scolaires

- Elaboration et mise en œuvre des programmes d’études actuels

- Défis à relever et perspectives d’avenir

Le conférencier a d’abord procédé à une clarification conceptuelle, en précisant que le programme scolaire est un document pédagogique officiel et obligatoire qui présente un ensemble structuré d’objectifs et/ou d’objets d’apprentissage ou d’activités se rapportant. Tout programme scolaire, a-t-il ajouté, est un ensemble de savoirs qui a pour objet pratique la construction méthodique d’un plan éducatif global ou spécifique reflétant les valeurs et les orientations d’un milieu devant permettre l’atteinte des finalités et des buts fixés à l’éducation. Il a poursuivi en indiquant que le projet de société et la politique éducative sont les fondements d’un programme scolaire.

L’inspecteur de l’Enseignement du Premier Degré, qui est également consultant en ingénierie de l’éducation et de la formation, a donné ensuite une typologie des programmes scolaires, soulignant que la plupart de ces programmes existants sont axés sur :

- les contenus et privilégient la mémorisation et la restitution de connaissances ;

- les objectifs à atteindre et privilégient les comportements à installer (saucissonnage des objets d’apprentissage d’où incapacité à mobiliser des acquis parcellaires pour faire face avec efficacité aux réalités de la vie active) ;

- les compétences qui tout en conservant les avancées entraînées par la pédagogie par objectifs (PPO), se préoccupent d’assurer une éducation scolaire plus pertinente, plus utile, plus efficace et mieux adaptée aux réalités et aux objectifs de développement des pays.

Pour M. Magloire COSSOU, la nécessité de changer de programmes doit être perçue au niveau mondial et du fait de l’évolution du rôle de l’école.

Au niveau mondial, la nécessité de changer de programmes est essentiellement due à :

- l’accroissement rapide de la quantité d’informations et de savoirs (X 10 plus importante qu’il y a 25 ans ; X 2 tous les 7 ans ; 20.000 publications / an) ; informations et savoirs plus accessibles et plus fluctuants ;

- l’apparition et la propagation rapide de nouveaux types de problèmes (réchauffement climatique, VIH/sida, OGM, génome humain…)

De nos jours, le rôle de l’école a évolué. On note désormais qu’au lieu de transmettre elle-même aux élèves tous les savoirs dont ils ont besoin dans leur vie, l’école se préoccupe dorénavant de leur apprendre à apprendre (à rechercher les informations appropriées et à les gérer).

Nous sommes donc entrés dans l’approche par les compétences qui privilégie les sens que l’on donne aux apprentissages. Autrement dit, ce qu’on apprend à l’école doit servir à quelque chose dans la vie ; étant donné que l’on assiste aujourd’hui à un accroissement rapide des quantités d’information et des savoirs.

Selon M. COSSOU, les principales options possibles qui s’offrent au Bénin sont :

- la suppression pure et simple des nouveaux programmes d’études (NPE) et la remise en selle des anciens programmes ;

- la fermeture des établissements scolaires pendant quelques années pour préparer l’introduction des langues nationales à l’école ;

- la poursuite de la mise en œuvre des NPE en prenant toutes les mesures d’accompagnement nécessaires pour garantir sa réussite.

Pour M. Magloire COSSOU, les conditions essentielles pour la réussite des programmes d’études actuels sont:

prendre toutes les dispositions nécessaires pour que chaque école :

- dispose des ressources nécessaires pour accueillir convenablement et encadrer efficacement ses élèves ;

- utiliser de manière efficiente les ressources disponibles et les gérer rationnellement ;

- impliquer les parents d’élèves et la communauté dans l’animation et la gestion de l’école.

L’inspecteur de l’Enseignement du Premier Degré a alors indiqué que le Forum national de l’éducation a recommandé notamment le maintien des programmes d’études actuels, en y apportant les améliorations nécessaires. Il a précisé que les recommandations adoptées portent sur :

- le point des réformes éducatives ;

- la gratuité ;

- les programmes d’études ;

- les enseignants et la quête de la qualité ;

- la prise en charge de la petite enfance ;

- la promotion d’une formation technique et professionnelle ;

- l’enseignement supérieur au Bénin ;

- la recherche scientifique au service du développement ;

- l’alphabétisation et l’éducation non formelle ;

- l’introduction des langues nationales dans le système éducatif formel ;

- quel dialogue pour un climat social apaisé en faveur de l’éducation et pour un temps scolaire intégral.

Pour M. COSSOU, les recommandations adoptées au cours du Forum doivent permettre au Bénin de tendre vers les 900 heures requises pour que les années scolaires soient de véritables années scolaires comme elles sont reconnues ailleurs.

L’exposé de M. COSSOU a été suivie des interventions de :

- M. Adjihanou Pierre GBENOU, Directeur de l’Enseignement Primaire au Ministère des Enseignements Primaire et Secondaire

- M. Comlan Christophe ADJEVI, Inspecteur de l’Enseignement, Chef de la Circonscription scolaire, Cotonou-Lagune

- Mme HOUSSOU épouse OKOUMASSOUN P. Rosemonde, Coordonnatrice de FAWE-Bénin

- M. G. Paul LANCLOUNON, Chargé du développement des alternatives éducatives à Aide et Action-Bénin

- M. Oké Valère DOTONOU, Secrétaire général de l’Union Nationale des Enseignants du Secondaire du Bénin (UNES-Bénin)

- M. Coovi Anselme AMOUSSOU, membre du Syndicat National des Enseignants pour le Renouveau Educatif au Bénin (SYNERE-Bénin)

- M. Kossi Thomas CAKPO, Secrétaire général du Syndicat National des Professeurs des Lycées et Collèges (SYNAPROLYC)

Dans son intervention, M. Pierre GBENOU a dit que le Forum national sur le système éducatif béninois lui a permis de comprendre désormais que ‘’l’information est le nerf de la guerre. Car, le déficit d’information était à la base des tiraillements et difficultés enregistrés au sujet des nouveaux programmes d’études.’’ Il n’y a pas de programmes d’études neutres et aucun programme n’est définitif, a souligné le Directeur de l’Enseignement primaire avant d’ajouter qu’il faut tenir compte des évolutions pour améliorer un programme d’études.’’

‘’Le programme d’études en tant que document n’est qu’un élément de l’ensemble curricula. Cet ensemble comprend un certain nombre d’éléments sur lesquels il faut nécessairement agir si on veut atteindre un résultat. Le gros problème pour la société aujourd’hui, c’est de dépenser des fortunes pour les élèves. Et ces derniers quittent l’école sans pouvoir utiliser ce qu’ils ont appris. C’est ce que l’approche par compétences veut régler’’ a souligné M. Pierre GBENOU.

‘’Le Bénin n’est pas le seul pays au monde à adopter l’approche par compétences ; et si nous ne prenons garde, l’approche par compétences va nous échapper,’’ a martelé M. GBENOU.

De son côté, M. Christophe ADJEVI a dit que le constat fait aujourd’hui est que ‘’le niveau du français dans notre pays a baissé. Même à l’université, les professeurs se plaignent de faire le travail des enseignants du primaire et du secondaire.’’ Malheureusement, dira t-il, ‘’plus de 90 pour cent des enseignants ne sont pas outillés dans leurs matières et plus de 60 pour cent des enseignants du primaire n’ont pas reçu la formation nécessaire pour être des enseignants.’’

Pour Mme OKOUMASSOUN, ‘’les programmes d’études en vigueur au Bénin sont de bons programmes, qui ont connu des phases expérimentales et des phases correctives de 1994 jusqu’à leur généralisation en 1999. L’ONG IFESH a beaucoup appuyé le gouvernement dans la formation des enseignants.’’ Cependant, il est nécessaire que l’on s’occupe davantage de la formation continue des enseignants, a conseillé la Coordinatrice de FAWE-Bénin, qui a suggéré aussi que les nouveaux programmes d’études soient mieux connus du public, à travers notamment les radios locales et qu’une campagne d’information soit menée également par le RJCE-Bénin.

Pour sa part, M. Paul LANCLOUNON de Aide et Action-Bénin a indiqué que le diagnostic a été fait suffisamment au cours du Forum et qu’il est indispensable qu’un plan de communication efficace soit élaboré pour mieux communiquer sur les nouveaux programmes d’études.

Quant à M. Oké Valère DOTONOU, Secrétaire général de l’Union Nationale des Enseignants du Secondaire du Bénin (UNES-Bénin), il a précisé qu’’’en dehors des problèmes d’incompréhension auxquels les nouveaux programmes d’études sont confrontés, leur bonne mise en œuvre dépend aussi de la formation des enseignants. Or près de 90 pour cent des enseignants concernés sont des contractuels locaux. Par ailleurs, les enseignants qui sont formés ne sont pas suffisamment outillés. Le Forum a tracé les grandes lignes des actions à entreprendre pour une amélioration de la situation. Il s’agira désormais de faire des retouches en profondeur, de bien former et de bien suivre les enseignants,’’ a ajouté M. DOTONOU.

Le Secrétaire général de l’Union Nationale des Enseignants du Secondaire du Bénin (UNES-Bénin) a enfin appelé à l’association de tous les acteurs à cette tâche de retouches, car ‘’ce sont ceux qui se sentent écartés, qui jettent le discrédit sur les nouveaux programmes d’études.’’

Pour M. Coovi Anselme AMOUSSOU du Syndicat National des Enseignants pour le Renouveau Educatif au Bénin (SYNERE-Bénin), ‘’même si on n’avait pas engagé des réformes, il faudra aujourd’hui revoir la manière de former.’’ Il a dit avoir été formé sur l’approche par compétences, et qu’il y a du bien dans ces programmes d’études, contrairement à ce que certains croient.

‘’L’essentiel du problème de ces programmes réside dans leur mise en œuvre ; et le désordre que l’on observe actuellement est créé par les décideurs et les parents d’élèves, ‘’ a souligné M. AMOUSSOU. Il a exhorté les parents à faire du lobbying pour que ce qui doit être corrigé dans les nouveaux programmes d’études le soit rapidement.

Concernant les rapports entre les enseignants et les médias, M. AMOUSSOU a fait remarquer qu’il y a beaucoup de fausses informations sur les préoccupations des enseignants. Il a convié les professionnels de l’information à ‘’aller vers les enseignants concernés pour avoir la bonne information.’’ Car, dira t-il, ‘’l’enseignant apparaît comme l’éternel insatisfait. Il faut que les journalistes s’informent, parce que les plus coupables ne sont pas ceux que l’on croit,’’ a renchéri M. AMOUSSOU.

‘’Des mesures correctives ont été préconisées au Forum, afin qu’il n’y ait plus d’enseignants communautaires non formés. Tous les enseignants doivent désormais provenir des écoles normales,’’ a-t-il poursuivi. ‘’Si toutes les mesures recommandées peuvent être mises en œuvre, cela fera du bien à l’enseignement au Bénin,’’ a conclu le représentant du Syndicat National des Enseignants pour le Renouveau Educatif au Bénin.

Avant la série des questions, M. Kossi Thomas CAKPO, Secrétaire général du Syndicat National des Professeurs des Lycées et Collèges (SYNAPROLYC)i a appuyé les propos de ses collègues, en donnant quelques indications sur l’insuffisance d’enseignants qualifiés dans les établissements. ‘’Sans un nombre important d’enseignants suffisamment bien formés, il est impossible de mettre réellement en œuvre les nouveaux programmes d’études,’’ a martelé M. CAKPO. Il a en outre déclaré que les statuts pour les concours professionnels des enseignants au niveau du secondaire existent, mais ne sont jamais appliqués ; toute chose qui ne favorise par la promotion du métier d’enseignant.

D Questions des participants

Les questions sont entre autres :

- Quelles sont les mesures nécessaires pour corriger la situation des enseignants

communautaires ?

- Pourquoi les syndicats sont souvent sur la défensive au lieu d’être offensifs ?

- Pouvez-nous nous aider à mieux comprendre les différentes réformes engagées depuis

l’indépendance ?

- Pourquoi les enseignants grévistes la plupart du temps sont portés vers l’argent et non les programmes d’études ?

- Les concepteurs des Nouveaux programmes d’études ont-ils une fois au moins réfléchi sur ces programmes ? Y a-t-il eu une évaluation des nouveaux programmes ?

- Qu’avez-vous recommandé pour la formation des enseignants ?

- Qu’ont fait les concepteurs pour rappeler les autorités à l’ordre lorsque les nouveaux

programmes ne sont pas bien mise en œuvre ?

- Quelles sont les réactions des syndicats par rapport aux nouveaux programmes d’études ?

- Savez-vous que les enfants, du primaire au collège aujourd’hui, ne peuvent ni bien écrire, ni bien parler le français ? Que voulez-vous faire de ces enfants à l’université ?

E Réponses du conférencier et des intervenants

Les questions ont suscité parfois la colère du conférencier principal et des différents intervenants qui ont fustigé le fait que certaines de ces interrogations proviennent d’un journaliste, qui est aussi un enseignant vacataire.

Répondant aux préoccupations exprimées, M. Magloire COSSOU a indiqué que le Ministère des Enseignements Primaire et Secondaire est souvent réactif au lieu d’être proactif. Il a rappelé que le Ministère de la Santé a toujours eu un programme de communication, alors que les Ministères en charge de l’Education n’en a jamais eu. Les Ministères de l’Education disposent généralement de trois volets. Il s’agit des volets pédagogiques, planification, et participation du public et réformes.

Pour M. COSSOU, le volet pédagogique a toujours fonctionné. Par contre, les autres volets planification, et participation du public et réformes sont souvent relayés au second plan. Les Ministères de l’Education ont toujours perçu la communication comme de la propagande.

Au sujet ‘’des enfants qui lisent ou parlent moins bien le français que nous les adultes,’’ l’Inspecteur de l’Enseignement a récusé ces affirmations, indiquant qu’elles ne sont pas évidentes. Il a toutefois souligné que chacun doit battre sa coulpe pour avoir accepté la fermeture des écoles normales pendant longtemps au Bénin. Les nouveaux programmes, dira t-il, ‘’je les vends partout où cela marche. Au Bénin, si on veut que cela marche, nous y contribuerons.’’

M. Magloire COSSOU a exhorté les journalistes à aller vers les sources d’information et à rechercher les documents nécessaires pour faire un travail professionnel.

Les représentants des syndicats présents abonderont dans le même sens, avant de fustiger les comportements des contractuels, qui font les cours pendant que les agents permanents de l’Etat sont en grève. ‘’Ce sont les contractuels qui nous empêchent de faire aboutir nos revendications,’’ ont-ils affirmé.

M. Comlan Christophe ADJEVI, Inspecteur de l’Enseignement, Chef de la Circonscription scolaire interviendra pour dire que ‘’c’est honteux que des journalistes ne soient pas capables de dire ce qu’ils ont entendu, parce qu’ils n’ont pas reçu leurs cachets.’’ Le problème essentiel des nouveaux programmes d’études est celui de la formation des enseignants, devait-il ajouter avant d’inviter également ‘’les journalistes à se rapprocher des responsables du système éducatif pour savoir ce qui s’y passe.’’

Mme OKOUMASSOUN P. Rosemonde, Coordonnatrice du FAWE-Bénin a demandé aux décideurs, aux acteurs et à tous ceux qui détiennent l’information sur l’éducation à en faciliter l’accès aux journalistes pour aider à la promotion des nouveaux programmes d’études.

Pour M. Paul LANCLOUNON, Chargé du développement des alternatives éducatives à Aide et Action-Bénin, la question du manque d’enseignants réside essentiellement dans le manque de ressources. Malheureusement la communication a également fait défaut, accentuant les difficultés dans la mise en œuvre des nouveaux programmes d’études. Il a invité les médias à s’organiser en lobbying et à actualiser leur plan d’action pour une meilleure couverture de l’éducation.

II Evaluation de la table ronde

A l’issue des échanges et discussions, les participants ont procédé à l’évaluation de la table ronde. Les résultats recueillis à partir des 32 fiches remplies sont les suivants :

QUESTION N°1

Dans le cadre de vos occupations actuelles et à venir, la table ronde a-t-elle été utile ?

Oui = 31 Non = 1

Soit Oui = 96,87 % Non = 3,12 %

QUESTION N°2

Les objectifs ont-ils été atteints ?

Oui = 27 non = 3 Nul = 2

Soit Oui = 84,37 % Non = 9,37 % Nul = 6,25 %

QUESTION N°3

La méthode utilisée a-t-elle été de type participatif ?

Oui = 29 Non = 2 Nul = 1

Soit Oui = 90,62 % Non = 6,25 % Nul = 3,12 %

QUESTION N°4

Vos remarques générales et suggestions sur le déroulement de la table ronde

Les réponses à cette question sont les suivantes :

- J’ai suivi avec beaucoup d’intérêt le déroulement de cette table ronde qui pour moi apporte de la lumière sur le concept qu’est le nouveau programme. A travers les explications du communicateur, des réalités ont été dénoncées et les problèmes liés à l’application de ce nouveau programme ont été énumérés.

- Je pense que l’exposé de M. Cossou a permis de mieux appréhender ces programmes mais aussi de comprendre que le plus grand problème demeure le déficit de communication.

- Ambiance conviviale ; cadre et horaire de travail appropriés ; échanges francs et enrichissants. Ne pas s’arrêter en si bon chemin.

- Une excellente organisation. Si depuis l’année où ces programmes d’études scolaires ont commencé à être mises en application, ces genres de rencontres avaient été organisées, j’espère qu’on en serait pas à cette étape où l’on qualifie ces programmes de ‘’programmes à polémique’’.

- C’est une expérience à renouveler. La table ronde a permis de comprendre les fondements des nouveaux programmes, les causes du dysfonctionnement observé.

- D’une manière globale, la table ronde s’est bien déroulée. Les communicateurs maîtrisent leurs sujets.

- Des acquis certains en ce qui concerne les types de programmes appliqués successivement au système éducatif béninois. Des débats qui, bien que courts ont permis de situer quelque peu les tenants et les aboutissants des NPE au Bénin. Les tables rondes annoncées permettront de traiter des aspects spécifiques de la question des NPE et du système éducatif au Bénin.

- Cette table ronde a beaucoup plus l’air d’une formation.

- Je crois que l’approche participative qui a guidé la table ronde est d’une utilité et d’une importance capitale puisqu’on a pu échanger sur les contours et les détails des programmes d’études.

- La rencontre m’a permis de me désintoxiquer par rapport à ce qu’on entend par nouveaux programmes d’études. J’en ai une vision plus claire maintenant du fait des explications fournies par les acteurs dépassionnés, contrairement à ce qu’on entendait dans les médias jusqu’ici.

- Les débats ont été libres, riches et assez intéressants.

- Bonne approche, la table ronde a permis de faire reculer les zones d’ombres et autres mauvaises à priori sur la question des nouveaux programmes

- Je crois que de bonnes suggestions ont été faites et les remarques sont pertinentes et claires.

- Une initiative à renouveler pour l’appropriation par les journalistes des problématiques de l’éducation pour une bonne information.

- Les tables rondes permettront également de faciliter la spécialisation et une meilleure maîtrise des questions liées à l’éducation.

- Le temps n’était pas suffisant.

- Je voudrais qu’il se crée un forum d’échanges au sujet des questions portant sur l’éducation au Bénin et ailleurs.

- La table ronde a été suivie avec intérêt. Cependant, il serait intéressant de faire un atelier pour permettre de produire des magazines.

- Débats enrichissants, intérêt manifeste des participants.

QUESTION N°5

Quelles actions comptez-vous entreprendre après cette table ronde ?

Les réponses sont celles-ci :

- J’envisage déjà, la semaine prochaine, de réaliser un papier de fonds sur les programmes d’études sur la base des nouvelles données acquises.

- Faire régulièrement des articles en s’approchant beaucoup plus des acteurs de l’éducation.

- Je compte désormais réaliser des magazines et reportages sur le système éducatif béninois pour expliquer réellement de quoi il s’agit.

- Maintenir le contact avec les personnes ressources pour mener des enquêtes, des investigations et faire des reportages pour un meilleur suivi des informations issues de notre table ronde.

- Je compte désormais m’investir dans une campagne afin de rendre aux nouveaux programmes leurs images réelles.

- Informer au mieux la population sur les questions d’éducation.

- Des actions radios de grandes envergures pour désintoxiquer les uns et les autres sur les points d’ombres du secteur éducatif au Bénin.

- Identifier des thèmes et des angles de traitement pour réaliser des dossiers ou des grands reportages sur le secteur de l’éducation afin de disséminer au sein des lecteurs les préoccupations de l’heure.

- Ecrire des articles de réflexion, faire des reportages pour pouvoir mieux expliquer ce qu’est réellement le programme d’études par compétences.

- Faire des interviews, des magazines pour mieux expliquer au public les problèmes de l’enseignement.

- Savoir porter des informations au public ; car, comme l’ont souligné les intervenants, beaucoup de journalistes traitent les événements de façon superficielle sans aller au fond des préoccupations.

- Faire l’effort de prendre en compte les conseils qui ont été donnés à l’endroit des journalistes.

- Réaliser des magazines pour permettre de comprendre les nouveaux programmes d’études.

- Continuer de faire des recherches afin de mieux cerner les programmes d’études pour éclairer la lanterne des parents d’élèves sur le débat des nouveaux programmes d’études.

- Continuer, comme par le passé, de produire des articles de presse sur les grandes questions de l’éducation.

- Communication intense pour permettre à la population de mieux comprendre le bien fondé de l’application des nouveaux programmes.

- Garder le contact avec les participants.

- Susciter, encourager des rencontres de ce genre.

- Rendre compte aux autorités du MEPS et les inciter à élaborer ou à améliorer un plan de communication sur ses activités.

- Faire parvenir aux journalistes, par l’intermédiaire du réseau, un certain nombre de documents, d’information et de thèmes exploitables dans les organes.

- Evaluer les différentes difficultés dans la mise en œuvre des programmes en cours et sensibiliser les différents acteurs pour leur réussite.

- Participer à la promotion des programmes scolaires en apportant des éclaircissements aux parents d’élèves.

- Aider à comprendre le bien fondé des nouveaux programmes d’études.

- Mener des actions pour la revalorisation de la fonction enseignante

- Pouvoir bien aborder les questions relatives aux nouveaux programmes d’études avec moins de difficultés.

- Mener une série d’investigations sur les nouveaux programmes d’études, afin d’en faire mieux saisir les contours aux lecteurs.

- Constituer une référence dans le traitement de l’information et la rédaction des articles de presse sur l’éducation.

- Produire des articles d’enquêtes par rapport à un certain nombre de sujets enregistrés au cours des discussions.

- Œuvrer pour que toutes les recommandations/suggestions soient visibles.

- Rendre compte à la hiérarchie des résultats obtenus.

- Faire connaître le Réseau des journalistes.

- Choisir des sujets d’articles et explorer des aspects thématiques sur les programmes d’études et les publier.

- Faire comprendre les nouveaux programmes d’études au public à travers les articles.

III Suivi de la table ronde

Pour le suivi de la table ronde, M. Latévi Lawson, Chargé de formation/programme du COMED, qui était le modérateur de la séance, a d’abord donné la parole aux participants pour des propositions d’actions à entreprendre.

Un participant a suggéré que le COMED propose des thèmes de reportages, d’analyses, de magazines ou autres sur l’éducation que les journalistes pourraient traiter.

Un autre participant a proposé que le Rapport de cette table ronde soit envoyé à tous les membres du réseau pour une meilleure appréciation du travail à faire, notamment dans le domaine de l’investigation journalistique.

Il a été suggéré également que le Rapport du Forum national sur l’éducation soit mis à la disposition des journalistes du RJCE-Bénin pour un suivi par la presse de la mise en œuvre des recommandations.

Prenant la parole après la série de suggestions et propositions, M. Latévi Lawson a dit que le COMED, qui appuie financièrement les Mensuelles, et le RJCE-Bénin, initiatrice de ces rencontres, suivront régulièrement les productions des participants sur l’éducation, afin d’évaluer l’impact réel de ces activités. Il a indiqué que le COMED pourrait aussi financer très prochainement un atelier national de formation des journalistes et communicateurs spécialisés en éducation pour le renforcement des capacités des membres du RJCE-Bénin.

Enfin, M. Latévi Lawson a convié les membres du réseau à s’engager davantage dans la promotion de l’éducation pour le développement national.

IV Clôture des travaux

Dans son allocution de clôture des travaux, le Président du RJCE-Bénin a remercié les personnes ressources qui ont accepté de consacrer une partie de leur temps à l’information des membres du réseau sur les programmes d’études actuels et les orientations nouvelles du Forum national sur l’éducation. M. Gérard GUEDEGBE a ensuite félicité les membres du RJCE-Bénin pour la part active qu’ils ont prise dans la couverture médiatique du Forum national.

Le Président du RJCE-Bénin a par ailleurs renouvelé sa gratitude au Groupe de travail COMED qui, par son appui financier et technique, soutient les Mensuelles de l’éducation pour permettre aux membres du réseau d’être imprégnés régulièrement des réalités du secteur et de disposer de pistes d’investigation. Il a promis que le rapport de la table ronde, dont la rédaction est confiée à un membre du RJCE-Bénin, sera élaboré dans les meilleurs délais et transmis à tous les participants.

V Recommandations

Cette table ronde a suscité un grand intérêt aussi bien de la part des professionnels des médias que des personnes ressources qui ont eu à l’animer. Néanmoins, les observations faites dans la mise en oeuvre de cette table ronde nous incitent à recommander ce qui suit :

- que la presse audiovisuelle soit mieux représentée dans les activités des prochaines Mensuelles ;

- que les participants invités à de telles rencontres prennent connaissance d’avance des thèmes à examiner pour mieux se préparer ;

- que les copies des textes des exposés soient mis à la disposition des participants dès la fin des séances ;

- que la durée des pauses café soit portée à 30 minutes pour permettre aux journalistes qui souhaiteraient interviewer des personnes ressources de le faire pendant ces périodes ;

- que les personnes ressources respectent scrupuleusement la durée des exposés pour que les participants aient suffisamment du temps pour les questions et réponses.

VI Conclusion

Les résultats de l’évaluation prouvent largement que cette table ronde a été une réussite.

Les participants, dans leur grande majorité, ont apprécié l’éclairage qu’elle leur a apporté dans la compréhension des programmes d’études actuels au Bénin. Les conseils prodigués par les personnes ressources et les engagements pris par les membres du RJCE-Bénin sont aussi la preuve que les Mensuelles peuvent contribuer à améliorer non seulement la compréhension que les médias ont des questions de l’éducation mais également les relations entre la presse et les différents acteurs du système éducatif.

vendredi 9 mai 2008

Le président Guebuza à la biennale de l’éducation en Afrique: Continuer à investir dans la formation du capital humain

Maputo, 6 mai 2008 – Le chef de l’Etat mozambicain, Armando Emilio Guebuza, a ouvert lundi 5 mai, au Centre international des conférences Joaquim Chissano, la biennale de l’éducation en Afrique par un fort plaidoyer en faveur de la poursuite et du renforcement de l’investissement dans le capital humain pour le développement des pays africains. A cet égard, il a tenu à féliciter l’Association pour le développement de l’éducation en Afrique (ADEA), « ce réseau qui intègre les gouvernements, la société civile et les partenaires internationaux », l’encourageant « à poursuivre pendant plusieurs années encore sa difficile mais noble mission ».

S’adressant aux 600 participants présents au rendez-vous le plus important sur le continent dans le domaine de la coopération éducative, le président Guebuza a déclaré que, concernant l’éducation post-primaire, thème de la biennale, l’enseignement technique et professionnel bénéficie d’une attention spéciale de la part du gouvernement de son pays. Ainsi, a-t-il indiqué, un programme intégré de réforme de l’enseignement professionnel a été lancé en vue de donner un nouvel élan à la formation de ressources humaines pour le pays. Il s’agit, a-t-il expliqué, d’un programme fondé sur le principe d’une plus grande flexibilité et polyvalence et d’une formation pour la vie basée sur l’acquisition de compétences, dont l’objectif est de former des citoyens aptes à participer de manière plus active à la production de richesses et à leur gestion judicieuse.

Pour le chef de l’Etat mozambicain, « il faut absolument continuer à investir dans la formation du capital humain, à introduire des améliorations significatives au plan de la qualité et du niveau des capacités de nos compatriotes et à encourager et appuyer l’effort en direction des filles ». A propos de celles-ci, il a souligné qu’il fallait non seulement favoriser leur scolarisation et leur maintien dans le système scolaire jusqu’au terme de leur formation, mais aussi leur proposer l’enseignement supérieur et l’enseignement technique et professionnel comme autant d’objectifs à atteindre.
Le président Guebuza a, par ailleurs, insisté sur l’importance de la recherche scientifique et technologique et des échanges entre les scientifiques africains, et entre eux et leurs collègues d’autres continents, processus dans lequel l’ADEA, a-t-il estimé, peut continuer à jouer un rôle de haut niveau.
Au nom du président en exercice de l’Union africaine (UA), Jakaya Mrisho Kikwete, le Premier ministre tanzanien, Mizengo Peter Pinda, a suggéré l’élaboration par l’organisation panafricaine d’un rapport annuel sur l’éducation présentant les progrès et les contraintes de chaque pays et permettant de s’inspirer des expériences proches, au lieu de toujours tourner les regards vers les modèles des autres continents. Dans ce domaine, a-t-il souligné, « l’ADEA a beaucoup à offrir et nous devons avoir nos propres plans pour atteindre nos objectifs ». Il a insisté sur l’ancrage de l’Association dans l’Afrique et le renforcement du partenariat avec l’UA.

Dans son message lu par Boubekeur Benbouzid, ministre algérien de l’Education, le président de la République d’Algérie, Abdelaziz Bouteflika, hôte d’honneur de la biennale, a relevé les efforts déployés par les pays du continent, dont le taux d’alphabétisation est passé de 10% dans les années 1960 à 70% aujourd’hui, et les inscriptions scolaires de 57% en 1999 à 70% en 2005. Il reste cependant, a poursuivi le chef de l’Etat algérien, « que 30% de jeunes Africains ne sont pas scolarisés, alors que le nombre d’enfants en âge scolaire augmente sensiblement. Le nombre de jeunes Africains de moins de 14 ans est passé de 273 millions en 1990 à 348 millions en 2007 ; il sera de 403 millions en 2015. »

Après avoir rappelé les engagements pris lors de la 2e Conférence des ministres africains de l’Education tenue en avril 2005 en Algérie ainsi que la création par le secrétaire général des Nations unies d’un groupe de pilotage chargé de coordonner les efforts en vue de la réalisation des Objectifs de développement du millénaire, le président Bouteflika a attiré l’attention sur les facteurs annihilant tout effort de développement dans le secteur de l’éducation que sont « les conflits politiques et militaires, les menaces à la paix et à la stabilité, la mauvaise gestion et le gaspillage ».

Le Directeur général de l’UNESCO, Koïchiro Matsuura, a insisté sur le tableau contrasté que présente l’Afrique en termes de progrès vers l’éducation. Ainsi, a-t-il indiqué, l’Afrique subsaharienne a été le continent dans lequel le taux d’inscription au niveau primaire a augmenté le plus rapidement. Entre 1999 et 2005, le nombre d’enfants à l’école a augmenté de 36 %, soit environ 29 millions. Un autre développement significatif, a-t-il poursuivi, a été « l’élargissement de l’éducation primaire afin d’y inclure les premières années du niveau secondaire de la scolarité, offrant ainsi aux enfants et à la jeunesse de meilleures chances de terminer la partie obligatoire de la scolarité en disposant des compétences nécessaires pour participer pleinement à leurs sociétés ».

Malgré ces tendances très positives, a fait remarquer M. Matsuura, les niveaux d’abandon sont plus élevés en Afrique que nulle part ailleurs dans le monde. L’Afrique subsaharienne compte encore 45% des 72 millions d’enfants non scolarisés, c'est-à-dire à peu près 33 millions au total. Parmi ceux-ci 54% environ sont des filles. Par ailleurs la qualité reste une source de préoccupation majeure, notamment en raison du manque d’enseignants qualifiés. A l’horizon 2015, il faudra 3,8 millions d’enseignants supplémentaires.

Après avoir relevé que 150 millions d’adultes en Afrique subsaharienne, dont deux tiers sont des femmes, ne possèdent pas les compétences de base d’alphabétisation, le Directeur général de l’UNESCO a évoqué l’ombre menaçante que constituent la crise alimentaire croissante, les ravages du HIV/Sida et la tendance à réduire les fonds alloués à l’éducation. Il a notamment exhorté les bailleurs de fonds à tenir les promesses du Forum de Dakar en avril 2000, soulignant que l’UNESCO s’engagera dans ce plaidoyer à l’occasion du Sommet du G8 à Hokkaido, en juillet prochain, et de la 4e conférence internationale de Tokyo sur le développement de l’Afrique, un mois plus tard.

Dans son mot de bienvenue, Bonifacio Aires Ali, ministre mozambicain de l’Education et de la Culture, a déclaré : « Penser à l’éducation post-primaire est une question d’urgence et de garantie pour notre survie comme Etats souverains ; réfléchir à l’éducation post-primaire aujourd’hui, c’est penser au développement des ressources humaines qui garantissent la victoire dans la lutte contre la pauvreté demain ; réfléchir à l’éducation post-primaire, c’est penser que nos jeunes, enfants, hommes et femmes doivent avoir des connaissances scientifiques, doivent maîtriser la technologie ; c’est garantir le développement durable de l’Afrique. »

Le président de l’ADEA, Dzingai Mutumbuka, s’est réjoui, pour sa part, d’une si grande affluence, avec une soixantaine de ministres, de la tenue de la biennale pour la première fois dans un pays lusophone d’Afrique et de la première participation des pays d’Afrique du nord. Il a estimé que le thème de la biennale était totalement approprié dans la mesure où il s’agit de la formation des compétences dont l’Afrique a besoin, de la reconstruction des systèmes éducatifs, ce qui représente un défi majeur.

La présidente du bureau des ministres africains de l’ADEA, Rosalie Kama-Niamayoua, ministre de l’Enseignement primaire et secondaire du Congo, a relevé que « la communauté éducative africaine, dans toutes ses composantes, décideurs politiques, professionnels et chercheurs en éducation, organisations de la société civile, partenaires techniques et financiers, se retrouve à Maputo pour identifier des pistes d’accélération des progrès de l’éducation dans notre continent, au moment où l’on parle de l’économie des savoirs ».

Elle a affirmé qu’une refondation de nos systèmes éducatifs s’impose à nous si nous voulons combler les fossés qui les séparent des systèmes éducatifs plus performants des autres continents. Il ne s’agit nullement, a-t-elle fait observer, d’une forme d’afro-pessimisme, mais d’une invite à un engagement volontariste pour relever les défis que pose l’éducation en Afrique. Mme Kama-Niamayoua a insisté : « Il nous faut oser rompre avec la reproduction des modèles, oser inventer les modèles adaptés à nos contextes et réussir des modèles éducatifs africains. »

Créé pour promouvoir et améliorer l’éducation des filles, le Forum des éducatrices africaines (FAWE) a identifié « de nouvelles avenues pour mieux appréhender les obstacles » à ses objectifs. Sa présidente, Simone de Comarmond, a annoncé une intervention pour orienter un plus grand nombre de filles vers la carrière enseignante. Par ailleurs, elle a indiqué que le FAWE a initié dans trois pays –Burundi, Libéria et Sierra Leone - un programme d’habilitation et d’autonomisation économique à travers la formation technique et professionnelle afin « d’intégrer les filles non scolarisées ou en déperdition scolaire pour cause de conflits ».

La vice-présidente de la Banque africaine de développement, Zeinab El Bakri, a axé son intervention sur le développement des compétences. Après avoir mis l’accent sur l’augmentation sans précédent du taux de croissance d’un bon nombre de pays du continent, elle a expliqué que de tels résultats tiennent aussi à des facteurs comme la paix et la stabilité, l’amélioration de la gouvernance et les réformes économiques. Toutefois, a-t-elle prévenu, la croissance enregistrée risque d’être freinée par le manque de ressources humaines compétentes dans de nombreux secteurs d’activité et à différents niveaux d’éducation. Ce sont là les défis auxquels il faut trouver des réponses appropriées en rapport avec les secteurs de production.

Mme El Bakri a choisi l’exemple actuel de la crise alimentaire pour plaider en faveur de l’enseignement agricole à travers la formation aussi bien professionnelle qu’universitaire. Elle a évoqué à cet égard l’adoption d’approches innovantes pour combiner recherche agronomique et entreprenariat, accélérer l’introduction des technologies agricoles modernes dans les systèmes locaux d’exploitation et auprès des paysans et autres exploitants agricoles. Une même réflexion est à entreprendre pour accélérer le développement des compétences dans d’autres secteurs parce que l’existence d’un capital humain bien formé constitue un préalable à une croissance et un développement socio-économique durables.

Le représentant de la Banque mondiale, Yaw Ansu, a reconnu que tous les pays africains subissaient une pression pour étendre les opportunités d’apprentissage dans l’éducation post-primaire. Répondre à cette demande, c’est permettre aux pays d’être en position de s’approprier et d’adapter les nouvelles technologies plus facilement en vue d’améliorer la compétitivité de leur économie dans le contexte de la globalisation. Cela constitue une nécessité compte tenu de l’évolution des enjeux économiques et de l’émergence de nouveaux grands acteurs sur le marché comme la Chine et l’Inde.

M. Ansu a mis en exergue le travail que réalise l’ADEA en créant un puissant marché d’idées et d’expériences, remplissant ainsi sa fonction de réseau des réseaux. C’est pourquoi, a-t-il affirmé, la Banque mondiale apporte son soutien constant à cette organisation unique dans son genre.

Le thème central « Au-delà de l’éducation primaire : défis et approches pour étendre les opportunités d’apprentissage en Afrique » sera abordé sous trois grands volets : l’extension de l’éducation obligatoire pour tous à 9-10 ans ; le défi du développement des compétences pour mieux préparer les jeunes à l’insertion socioprofessionnelle ; l’articulation entre le deuxième cycle du secondaire et l’enseignement supérieur en vue de la formation de ressources humaines pour le

développement de l’Afrique.

Première biennale accueillie par un pays lusophone, le rendez-vous de Maputo sera marqué par la célébration du 20e anniversaire de l’ADEA. Il consacrera l’ancrage de l’Association dans le continent qui se matérialisera par le prochain transfert de son Secrétariat à Tunis au sein de la Banque africaine de développement et par le renforcement du partenariat avec l’Union africaine.

Source: GT COMED